Culture d’entreprise & recrutement : le DRH nouveau est arrivé !

Sommes-nous arrivés à la fin du DRH administratif ? Crise sanitaire, marché du travail en tension, transformation, fusion, télétravail…

Les regards se tournent vers la fonction DRH en rupture dans son rôle de juriste, ou de gestionnaire de paie. Le ou la DRH, en plus de ces multiples casquettes essentielles dans l’organisation, se mue en « marketeur » interne et entre dans le « game » des campagnes de communication.

Le collaborateur est devenu le cœur de cible et le témoin exemplaire pour attirer et séduire de potentiels candidats. Trouver la perle rare sur le marché du travail revient à chercher une aiguille dans une meule de foin.

Heureusement, le marketing et la communication sont là. Analyse/diagnostic d’une culture d’entreprise devenue influenceuse dans les politiques RH.

Le SWOT du DRH

Un marché sous tension

Un marché du travail en crise, des entreprises qui se restructurent et des talents qui partent du jour au lendemain, sans oublier la crise sanitaire qui n’en finit plus. Comment donner envie aux hommes et femmes de venir travailler (même à distance) et y rester (si possible plus de 5 ans) ?  

Force est de constater que recruter des compétences est difficile. D’ailleurs, selon pôle Emploi : « 51 % des projets de recrutement sont jugés difficiles par les employeurs nationaux, contre 50 % en 2019 et 44,4 % en 2018. (“Besoins en Main-d’œuvre 2020”).
Les enquêtes et les expertises de l’école de management de Grenoble confirment qu’en 2018 « les tensions sur le marché du travail augmentent à travers le monde poussant les entreprises à innover en matière de politique RH » (cf. https://www.grenoble-em.com/sites/default/files/public/kcfinder/files/Climat_mondial_des_affaires_Sep_2018.pdf).

Un "turn-over" dégradé et inquiétant

Qui n’a pas entendu plusieurs fois ces derniers temps dans son entreprise : “Un(e)tel(le) nous quitte pour créer sa boite ou se reconvertir dans un autre métier… ou Il/elle a fait une demande de rupture conventionnelle” ?
Même si Les Échos nous explique que nous entrons dans une phase de stabilisation, le nombre de ruptures conventionnelles reste très élevé (cf. art. Après 10 ans de hausse, le nombre de ruptures conventionnelles se stabilise – 28/02/2020).

Aussi, le « turn-over » inquiète les dirigeants et pose question sur les effets que cela produit sur les finances de l’entreprise ou sur l’effet boule de neige que cela peut entrainer dans le collectif. Comment se positionner ? Comment faire pour garder la motivation et l’engagement des collaborateurs ? Et comment recruter le bon candidat après une rupture conventionnelle, surtout si le poste occupé était spécifique ou stratégique ?
Du burn-out au bore-out, des difficultés relationnelles au manque de reconnaissance, le sujet de l’engagement devient marquant. Selon un sondage de Gallup, “seuls 10 % des salariés européens se disent « engagés » au travail, et seulement 6 % en France. La moyenne mondiale, selon cette étude, se situe à 15 %. Or l’engagement est étroitement corrélé à la performance. Le taux d’engagement monte à 70 % pour les entreprises qui réussissent le mieux (cf. Gallup)”.

Des candidats en quête de sens...

Même si la loi de cohésion sociale (2005) a joué un rôle important dans l’amélioration des conditions de travail, notamment avec la prévention des risques psychosociaux, l’amélioration de la qualité de vie au travail, ou aujourd’hui la performance sociale, cela n’a pas eu l’effet escompté sur l’engagement des salariés dans leur entreprise.
Bien au contraire, les candidats aux compétences spécifiques sont conscients de leur potentiel et, paradoxe des chiffres du chômage, ils deviennent de plus en plus exigeants avec les recruteurs. Comme nous le confirme Michael Page : “La quête de sens se traduit par des questions de plus en plus nombreuses de la part des candidats (…) Quelle est la culture de l’entreprise ? Quelles sont ses valeurs ? En quoi sert-elle la société ? Les postulants sont attentifs aux réalisations et aux engagements sociaux de l’entreprise. Désormais, les valeurs de l’entreprise sont scrutées et jaugées”. [cf. art. « Recherche d’emploi : que veulent les candidats ? ».

...de bien-être et de QVT

Une récente étude de la DARES estime que 30 % des actifs considèrent que leur travail est inutile, dont « 8 % occupent un travail qui à leurs yeux manque de sens et de qualité. 11 % sont surexposés aux conflits de valeurs ». Cette étude affirme “que ces conflits de valeur ont des répercussions sur la souffrance psychique. Le risque de déclarer un mauvais état de santé est deux fois plus élevé pour quelqu’un qui est surexposé à ces conflits. La situation d’exposition la plus identifiée concerne deux actifs occupés sur dix, qui vivent des conflits éthiques, car ils doivent faire des choses qu’ils désapprouvent, même si par ailleurs ils ont les moyens de bien faire leur travail ».

Chez Forhuman, le cabinet s’attache à traiter ces sujets anxiogènes. Aussi dans l’enquête « Les enseignements de la crise du Covid » (mars 2021), nous apprenons qu’il est fondamental aujourd’hui pour une entreprise de prendre en compte la notion de réceptivité dans le cadre d’une stratégie de performance sociale. 76,3 % des salariés interrogés se sentent davantage sensible au bien-être au travail. Patrick CHARRIER, PhD et co-fondateur de Forhuman, nous explique que “dans notre cercle social, nous ne demanderons plus la nature du travail à travers la question : que fais-tu ? Désormais, nous demanderons : pour qui travailles-tu ?” (Podcast #Perspectives n°4 – Juin/Juillet 2021 : Culture d’entreprise & engagement des salariés).

Diagnostic : "RH" comme richesses humaines ?

Les ressources humaines doivent fondamentalement se transformer et intégrer cette nouvelle dimension à leur discipline déjà très complexe : la communication-marketing.

À la recherche de la culture perdue…

Analyse des besoins, études des forces et faiblesses (SWOT), rédaction de manifestes, engagement solidaire, écologique et responsable, audit des conditions de travail, RSE… Les DRH ne sont plus cantonnés uniquement à un rôle de juriste administratif, l’humain (re) devient le cœur de leur métier, et ils doivent capitaliser les retours terrain pour bâtir des plans de communication interne sur le long terme. 
Cette prise de conscience les amène à se questionner en profondeur sur l’évolution de leur culture d’entreprise. Car la grande crainte est la perte de sens pour les salariés, ou l’anomie collective pouvant aboutir à des maladies professionnelles comme le burn-out ou à une faillite managériale. 
Copier/coller des valeurs comme : innovation, collectif et satisfaction client ne suffisent pas à susciter l’engagement des collaborateurs. La culture d’entreprise est souterraine et sa rédaction est difficilement traduisible. Au contraire, ces mots-valises entretiennent l’idée d’une communication kleenex dans un monde où jeter n’est plus corporate, même si le recyclage peut avoir des vertus.
La culture doit être interrogée en profondeur avec rationalité et objectivité. Elle doit faire l’objet d’un questionnement psychologique pour faire émerger de véritables valeurs singulières, uniques, propres à l’histoire de l’entreprise. La communication n’est qu’un outil pour promouvoir et entretenir le sens de cette culture. Il est nécessaire que cela s’inscrive dans un temps long, là où les hommes et les femmes préfèrent la récompense immédiate. Le marketing devra quant à lui faire émerger les nouveaux besoins des collaborateurs dans l’espoir de les fidéliser.
Le sens ne se décrète pas, il évolue et doit faire l’objet d’actes forts et mesurable pour que le corps social puisse se positionner et être fédéré, dans l’organisation, à son positionnement commercial (externe).  Dorénavant, la cible « interne » est étroitement liée aux clients « externes », qui plus est pendant cette période de crise sanitaire.
La première question à se poser est : quelle est la mission de votre entreprise ? Cette simple question peut amener différentes réponses, voire des surprises dans un comité de direction. Les dirigeants doivent répondre sincèrement au QQCP : Quoi, Quand, Comment, Pourquoi et confronter leurs réponses avec les membres du collectif pour déterminer s’ils sont en cohérence avec leur histoire. L’objectif de cette introspection vérifie le décalage (ou non) entre le management stratégique et son déploiement opérationnel. C’est un fait, La culture d’entreprise se construit à travers des engagements forts et éprouvés dans le temps.

Positionnement stratégique : produire de la valeur éditoriale

La communication interne n’est plus uniquement le relais de la cohésion des messages du groupe, notamment dans le cadre de fusion-acquisition ou absorption… La com interne se concentre sur l’individu, ses individualités et les synergies que cela entraîne à travers la valorisation du collectif, le bien-être, la reconnaissance, le podium, le feedback…

Les salariés, les équipes et les managers de proximité sont devenus les nouveaux héros de l’entreprise et représentent les nouveaux clients du marketing RH.

DRH : nouveau community manager de l'entreprise ?


Grâce à cette richesse humaine, le / la DRH va pouvoir construire une image dynamique, sincère, exemplaire pour séduire, attirer et retenir les talents. LinkedIn, Facebook, Twitter, Instagram… deviennent d’excellents relais d’image et donc de promotion de la culture d’entreprise pour attirer, susciter le désir et… recruter.
Les sites internet dédiés aux recrutements n’hésitent pas à mettre en avant l’engagement et la valeur de l’entreprise. Par exemple,  le site Welcome to the Jungle nous explique concrètement le phénomène : “Chaque entreprise communique à travers du contenu exclusif : photos des locaux, interviews des dirigeants et des collaborateurs, statistiques clés comme la parité, l’âge moyen, le nombre d’employés, etc. Nous permettons aux entreprises de grandir avec des employés qui souhaitent aller dans la même direction tout en partageant les mêmes valeurs”.
Cette constatation se retrouve dans la plupart des sites de recrutement ou s’affiche sur les pages des entreprises.

Forhuman avec son étude sur “les enseignements de la crise du Covid estime que “la nature des besoins exprimés montre une urgence de mise en cohérence entre les valeurs individuelles et les valeurs collectives, particulièrement celle de l’entreprise. Aussi, la somme exprimée des besoins de cette enquête invite à penser le contrat de travail par delà la notion de subordination.
L’éco-système du recrutement est ainsi en pleine mutation. Le néo DRH doit prendre en compte ses facteurs essentiels pour proposer un “contrat de confiance” singulier via ses médias (site internet, sites d’emploi, réseaux sociaux…) avec l’aide de son attaché de presse (son chargé de com interne).

Le story telling est devenu l’arme-séduction des recruteurs !

Plus la culture d’entreprise est mis en avant, clairement identifiable et inscrite dans ses principes humains et mieux les salariés, candidats pourront s’identifier, se sentir valoriser, et proposer leur candidature. Sans compter que l’objectif interne d’engager les salariés (anciens) est rempli puisqu’ils peuvent s’exprimer sur les sites ou les réseaux pour témoigner de la qualité de l’entreprise et de leur épanouissement. Neanmoins, nous pouvons avoir en tête que le salaire, la reconnaissance, la sécurité… restent des besoins essentiels, comme nous l’indique cet article de The conversation, où la pyramide de Maslow revient en force notamment avec les effets de la crise.

Le temps des DRH était déjà précieux, mais aujourd’hui les ressources humaines vont devoir composer avec cette nouvelle donne du recrutement. Marketing et communication ne s’improvisent pas et ces directions vont devoir se serrer les coudes (si elles existent dans l’organisation) pour proposer des valeurs fortes en phase avec leur histoire ou leur positionnement commercial. Le Dircom/DRH deviendrait-il le talent hybride pour attirer, fédérer et fidéliser les collaborateurs d’une marque… employeur ?  Attention à ce que la profession ne tombe pas dans l’épuisement professionnel.

Photo by Kessadir

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