Mieux vaut changer de paire de lunettes, que de subir la crise !

Qu’allons-nous comprendre de la crise Covid-19 et des périodes successives de confinement, pour penser le travail de demain ?
De nouvelles formes d’organisation accélérées par l’obligation de nouvelles pratiques et organisations pourront-elles se fondre dans l’ordinaire du travail ?
Le lien au travail et, plus largement, le contrat social qui lie femmes et hommes au travail seront-il redistribués au regard des expériences nées de leurs pratiques de travail durant le confinement ?

Autant de questions qui méritent toute notre attention. Pour en savoir davantage, Focus sur une situation concrète qui a mobilisé les équipes de Forhuman.

Cas pratique avec la CFTC

La CFTC pose une problématique simple dans ce contexte particulier : comment les acteurs du dialogue social, à commencer par les représentants de personnel, parviennent-ils à rester des relais efficaces de la qualité de vie au travail ?
Le syndicat a souhaité prendre la température de ses propres adhérents, en termes de bien-être, de santé et de difficultés. Être à l’écoute de ses propres adhérents pour mieux les épauler durant la crise dans leur rôle d’acteur social ou, simplement, de collègues.

« Plus de 3 000 adhérents ont répondu à notre enquête comportant 70 questions (...) leurs réponses ont permis d’identifier des leviers importants d’une nouvelle approche de la santé et de la performance sociale au travail ».

La proposition du cabinet Forhuman : la Postvention !

Très rapidement, la question s’est posée de savoir comment questionner le sujet de la santé, du bien-être et de la qualité de vie au travail dans une période de changement aussi brutal. Que peuvent nous apporter les multiples questionnaires déjà existants sur le marché de l’évaluation dans une période aussi déstructurante et incertaine ? 
Nous savions déjà que de nombreux pans de l’organisation de l’activité, de la relation au travail et du contexte ont été malmenés, et que cela a très certainement fortement impacté la santé au travail.
Mais ce changement brutal invite à de nouvelles observations. Pour certains cette période a été bien vécue. Des solutions trouvées par l’entreprise, des aménagements réalisés ont parfois (ou souvent ?) fait émerger de nouvelles manières de faire, une forme d’autonomie, un intérêt retrouvé (cf. certaines équipes hospitalières).

Comment prendre en compte ces points positifs avec des approches et des questionnements classiques ?

C’est avec de nouvelles paires de lunettes que nous avons proposé à la CFTC d’aborder le vécu de ses adhérents. Cette période, par la rapidité des changements qu’elle impose, oblige à s’intéresser à la façon dont les organisations prennent en compte la santé et le bien-être comme éléments stratégiques de leur développement. En effet, ce sont les individus et les collectifs de travail, à qui souvent on a autorisé de nouvelles formes d’autonomie, qui ont su trouver de nouvelles façons de faire, de nouveaux équilibres en termes de santé et de satisfaction au travail.

Changez vos paires de lunettes : la postvention en approche !

Ces nouvelles paires de lunettes, cette nouvelle approche que le cabinet Forhuman a proposée, c’est celle de la postvention (utilisée principalement en psychologie communautaire en Amérique du bord nord pour accompagner les crises suicidaires). Une idée simple qui considère que la meilleure façon d’aborder la crise [qui vient] ne doit pas consister (uniquement) à regarder ce qui a dysfonctionné auparavant. Elle doit prendre en compte ce qui est susceptible d’aider les organisations, les collectifs et les individus à rester debout demain. Si les coordonnées du problème ont fondamentalement changé avant et après la crise, alors, la réponse est dans la capacité à identifier ces nouvelles coordonnées et à comprendre le poids qu’elles peuvent avoir dans le rétablissement et/ou le maintien en équilibre de nos organisations de travail. Des pans entiers de résilience se cachent donc derrière la manière dont les salariés ont aménagé les effets de la crise. Il revient alors d’aller les débusquer au plus près du travail réel, dans des temps et des espaces d’écoute pour écouter la crise sans avoir peur d’elle.

« Cette étude (...) permet d’abord de mesurer avec précision l’impact humain et social de la période de confinement. Elle permet surtout de vérifier que de nouveaux besoins ont émergé (...) ».

Résultats : une meilleure vue sur les nouveaux besoins et la réceptivité des entreprises

Forhuman a proposé à la CFTC un questionnaire ad’hoc qui interroge 3 dimensions du vécu des salariés. Leur vécu des risques, l’identification des besoins qui ont émergé mais encore leur ressenti sur la réceptivité de leur entreprise dans la prise en compte des sujets de santé et le bien-être au travail et sa capacité à s’engager dans des changements positifs et durables.
Plus de 3 000 adhérents ont répondu à notre enquête comportant 70 questions du 8 juillet au 31 aout 2020. De toutes branches professionnelles, de toutes régions et quel que soit le mandat dont ils étaient dépositaires (ou non), leurs réponses ont permis d’identifier des leviers importants d’une nouvelle approche de la santé et de la performance sociale au travail.
Cette étude dont nous présenterons très bientôt les enseignements majeurs, permet d’abord de mesurer avec précision l’impact humain et social de la période de confinement. Elle permet surtout de vérifier que de nouveaux besoins ont émergé et, principalement, une attente forte en matière de responsabilité et de pro-activité dans la manière de vivre le travail dans un sens large qui intègre les dimensions sociales et éthiques.
C’est un processus malin et opportun de sérendipité qui s’est déroulé sous nos yeux. Des salariés ont fait, par hasard, des découvertes majeures qui vont obliger les entreprises à repenser les modèles managériaux, mais aussi les processus de coopération. Par ailleurs, il paraît évident que le champ d’action du salarié devra s’intégrer dans un écosystème plus large que l’écosystème économique. Celui-là devra intégrer des dimensions d’utilité de contribution sociétale avec plus d’assertivité. C’est la notion de subordination qui doucement s’effrite pour laisser apparaître derrière la poussière de cet édifice fragile la notion de coopération responsable qui saura engager autrement les salariés dans leur travail et, plus largement, dans la société.

Pour les partenaires sociaux, ce sont les axes de travail de demain. Des axes qui devraient aussi leur permettre de redéfinir leur place et rôle dans les organisations de travail de demain.